La crème anglaise


                 Les grumeaux & la crème anglaise

Un grumeau a, à priori plusieurs définitions, mais c’est tout d’abord une déplaisante structure dont le prototype s’obtient quand on verse d’un coup beaucoup de farine dans l’eau chaude. C’est donc, à priori un grain composé d’amidon, composé lui-même d’amylose et d’amylopectine. Mais notre recette ne fait pas intervenir de farine, nous avons donc du chercher d’où ces agrégats venaient !
 
Dès notre première tentative de crème anglaise, nous nous sommes retrouvés confrontés aux grumeaux, comme la plupart des cuistots ! Nous avons donc décidé, pour le bien de tous, de nous pencher sur ces intrus.
Voulant tout d’abord vérifier leur nature, nous avons enfilé nos blouses pour créer les grumeaux de la définition et les comparer grâce à l’eau iodée avec les notre (voir onglet expérience). Sans surprise, ils n’ont pas réagit ! Ces intrus sont fourbes au point de se faire passer pour d’autres, c’est en fait de simples agrégats. Mais par familiarité, nous leur laisserons leur titre de grumeau.


Des agrégats appétissants

Il nous a donc fallu chercher plus loin, aller fouiller dans nos grimoires, pour finir par tomber sur les protéines. Qu’est ce qu’une protéine ? Un nouvel intrus ? No panique, il s’agit d’une chaîne d’acides aminés, elles sont essentielles pour l’organisme, mais juste difficiles à manier.
Notre champ fut alors élargit, première étape : composition du jaune.

         Le jaune, dans toute sa complexe splendeur !


Contrairement au blanc, le jaune d’oeuf ne contient pas de protéines en grande quantité mais est très riche en lipides qui s’associent avec plusieurs protéines. Elles sont en l’occurrence associées au cholestérol (LDL et HDL), on retrouve entre autre la livetine, la phosvitine, la vitelline et vitélénine. Ces protéines contiennent des acides aminés essentiels tels que la lysine et méthionine (mais aussi de la phénylalanine, arginine, cystine). Les acides animés sont en fait le résultat de la transmission de l’information génétique de l’ADN, transmis par l’ARN au ribosome qui n’avait plus qu’à traduire en construisant une chaîne avec ces fameux acides aminés.
Le jaune d’œuf est aussi constitué de minéraux, de glucose ainsi que de beaucoup de vitamines presque absentes dans le blanc (A, D, E, B1 et B2).


Représentation polygonale du cholestérol



Voilà, entre temps nous avons avancé dans nos recherches, et si les protéines sont responsables, il s’agit précisément de leur température de coagulation. A plus grande échelle, du jaune d’œuf qui coagule trop et forme des grumeaux.



La crème anglaise réussie, encore liquide, avec quelques agrégats microscopiques

 Apparition de petites masses compactes : le jaune coagule !




                      
Maintenant voilà comment :

      La réussir à tous les coups !

La réussite de la crème anglaise dépend en fait de la cuisson de l’œuf. Celle-ci est une opération complexe parce qu’il y a une grande diversité de protéines, chacune ne coagulant pas à la même température. Les scientifiques ont tout de même finit par déterminer leur température de coagulation (mais elle peut encore varier selon les sources), elle serait de 68°. Quand on obtient l’épaississement de la crème anglaise, cela correspond au moment du début de la coagulation de l’œuf ! Mais si l’on dépasse la température de coagulation, le nombre de protéines ayant coagulé est trop élevé, l’œuf se durcit et forme nos grumeaux.

La coagulation peut se diviser en deux étapes :
·         La dénaturation = Les protéines repliées sur elles-mêmes se déroulent, il s’agit en fait de la rupture des liaisons faibles, les liaisons hydrogènes.



·         L’agrégation = Une fois déroulées, elles se réassocient sous l’effet de la chaleur (presque aléatoirement) en réseau (ce qui explique le durcissement).

Il suffirait donc de prendre la température pendant la cuisson de notre œuf…
Bien sur que non, pas aussi simple quand nous parlons de crème anglaise, car dans ce type de mélange, la température de coagulation d’un œuf varie selon les autres nombreux composants mais aussi de la puissance de chauffe (89°C rapidement, lentement à 78°C sachant que l’épaississement voulu est entre 80° et 84°) ! Cela est donc très difficile à prévoir. Mais nous savons que cette dernière absorbe de la chaleur, donc nous pouvons surveiller la température de cette manière : si après être restée stable, elle augmente c’est que l’on en approche. C’est à ce moment qu’il faut arrêter la cuisson de nos crèmes, parce que passée la coagulation, nous obtiendrons des grumeaux. Pendant son déroulement, la température peut de nouveau se stabiliser ou même, diminuer.
De plus, l’ajout d’amidon, donc de farine, permettra l’épaississement de la crème entre 65° et 70°, c'est-à-dire juste un peu avant la coagulation. L’empois qui sera formé stabilisera le jaune qui pourra être porté à ébullition sans former de grumeaux ! 

Maintenant, que vous n’avez plus d’excuse pour rater vos crèmes anglaises… Tous à vos fourneaux !